Insurrection à Paris : début de la Commune
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Durement éprouvé par le conflit franco-prussien et quatre mois de siège, Paris s’insurge contre le gouvernement dirigé par Adolphe Thiers le 18 mars 1871. Les élections municipales organisées par le comité central aboutissent rapidement à la proclamation d’une Commune libre. Du premier soulèvement populaire du 18 mars à l’écrasement de l’insurrection le 28 mai, la Commune de Paris n’aura duré que 72 jours. Pour Jules Vallès, écrivain et journaliste engagé, cet événement fut le couronnement d’un long combat politique, et son expérience de la Commune est au cœur de sa dernière œuvre romanesque. À l’occasion des 150 ans de la Commune de Paris, France Mémoire lui consacre en partie ce dossier.
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CHRONOLOGIE
1er Juin 1867
Premier numéro de l’hebdomadaire « La Rue », de Jules Vallès
‟ Mettez-vous dans vos meubles, mon cher, ayez un journal à vous !” ne cesse de me beugler le gros Villemessant. […] Et je l’ai fait ! – je me suis payé une bosse de franchise, une vraie tranche de dédain ! (L’Insurgé, chapitre 8)
La Rue, Première année, n°1 – 1er juin 1868

6 juin 1868
Loi autorisant les réunions publiques non politiques
En attendant, Paris s’agite. Il y a une réunion à Belleville. Dans la grande salle des Folies, le peuple s’entasse, frémissant. (L’Insurgé, chapitre 15)

12 janvier 1870
Assassinat de Victor Noir par Pierre Bonaparte
De tous côtés, par petits groupes, ou en bataillons comme nous, Paris monte vers Neuilly. On marche au pas dès qu’on est cent, on se donne le bras dès qu’on est quatre.
Ce sont des morceaux d’armée qui se cherchent, des lambeaux de République qui se sont recollés dans le sang du mort. (L’Insurgé, chapitre 15)

19 juillet 1870
Déclaration de guerre entre la France et la Prusse
On dirait une fête de la Haute, une cérémonie de gala, un Te Deum à Notre-Dame ; il flotte dans l’air un parfum de veloutine et de gardénia.
Rien ne dénote l’émotion et la crainte qui doivent tordre les cœurs quand on annonce que la patrie va tirer l’épée. (L’Insurgé, chapitre 16)

14 août 1870
Tentative de soulèvement à La Villette
Il ne faut pas appeler aux armes les jours où les pauvres font de la toilette, alors qu’ils ont, durant la semaine et du fond des logis sombres, rêvé une partie dans une guinguette cravatée de verdure.
C’est Gustave Mathieu, le poète, et Regnard, le chevelu, qui, m’abordant à une table de Bouillon Duval où je viens de m’asseoir, m’apprennent qu’une trentaine d’individus se sont jetés sur la caserne des pompiers de La Villette, et ont fait feu sur les sergents de ville. (L’Insurgé, chapitre 17)

2 septembre 1870
Débâcle de Sedan et chute du Second Empire
4 septembre 1870
Proclamation de la République et constitution d’un gouvernement provisoire de défense nationale
« À onze heures, rendez-vous au café Garin, côté des femmes – chut ! c’est pour dépister la police ! » On recevra communication d’une proclamation républicaine. À minuit, elle sera imprimée, et chacun en emportera des exemplaires… pour les coller.
Voilà ce que chuchotent les initiés des feuilles jacobines, et voilà aussi ce qui me fait prendre mes jambes à mon cou.
Allez vous faire lanlaire !
Je file, moi, en pleine foule ; je plonge dans le tas. Où y a-t-il du grabuge, la cohue sans nom, le courage sans chef ? (L’Insurgé, chapitre 18)

5 septembre 1870
Constitution d’un Comité central des 20 arrondissements de Paris, dit « de la Corderie »
Ce sont quatre-vingt pauvres descendus de quatre-vingt taudis, qui vont parler et agir – frapper, s’il le faut – au nom de toutes les rues de Paris, solidaires dans la misère et pour la lutte. (L’Insurgé, chapitre 19)
19 septembre 1870
Début du siège de Paris
27 octobre 1870
Capitulation du général Bazaine à Metz, d’abord démentie par le gouvernement
28-30 octobre 1870
Tentative de percée de la Garde nationale au Bourget. 1200 morts côté français.
Un officier du secteur nous avait accompagnés. Il a promis que s’il y avait du renfort à diriger sur le Bourget, c’est le 191° qui serait lancé le premier.
Ah ! bien, oui ! On s’est couchés, les larmes aux yeux, et l’on a remisé le drapeau trempé par la pluie et puant la laine mouillée, alors qu’il aurait dû embaumer la poudre ! (L’Insurgé, chapitre 21)

31 octobre 1870
Émeutes et tentatives insurrectionnelles
Émeutes et tentatives insurrectionnelles. Un groupe révolutionnaire, dont Blanqui, prend le pouvoir à l’Hôtel de ville. Jules Vallès s’empare de la mairie du XIXème arrondissement avec un groupe d’insurgés. Ces événements ne durent pas. (L’Insurgé, chapitre 21)
6 janvier 1871
Affiche rouge du 6 janvier : le Comité central appelle à l’insurrection
Il fallait prêter au peuple un langage à la fois simple et large. Devant l’histoire, il prenait la parole, dans le plus terrible des orages, sous le feu de l’étranger. On devait songer à la Patrie, en même temps qu’à la Révolution. (L’Insurgé, chapitre 23)

22 janvier 1871
Émeute place de l’Hôtel de ville
« Souvenez-vous du 22 janvier ! Si l’on fait un pas en avant, portes et fenêtres s’ouvrent, et nous sommes foudroyés à bout portant ! »
Voilà ce qui se dit autour de la place, que la nuit envahit déjà […] (L’Insurgé, chapitre 24)

28 janvier 1871
Signature de l’armistice mettant fin aux combats entre la France et la Prusse
8 février 1871
Élection des membres de l’Assemblée nationale
17 février 1871
Adolphe Thiers nommé chef du pouvoir exécutif de la République française par l’Assemblée nationale

18 mars 1871
Exécution des généraux Lecomte et Clément Thomas à Montmartre
« Pan, pan !
– Qui est là ? »
C’est un des trois amis qui savent ma cachette ; il est essoufflé et pâle.
« Qu’y a-t-il ?
– Un régiment de ligne a passé au peuple !
– Alors, on se bat ?
– Non, mais Paris est au Comité central. Deux généraux ont eu, ce matin, la tête fracassée par les chassepots. » (L’Insurgé, chapitre 24)

26 mars 1871
Election municipales

28 mars 1871
Proclamation de la Commune. Première réunion des élus dans l’ancien local de la commission départementale.
La voix ne sonnera point ici comme dans les salles de bal, faites pour les coups de grosse caisse ou les coups de gueule – il n’y a pas l’acoustique des tempêtes oratoires.
Le parleur n’aura point le piédestal de la tribune, du haut de laquelle on laisse tomber son geste et son regard. […] D’avance, la déclamation a du plomb dans l’aile !
Il faudra des faits, non des phrases ! – la meule de l’éloquence qui écrase du grain, et non le moulin que le vent des grands mots fait tourner ! (L’Insurgé, chapitre 28)

21 au 28 mai 1871
« Semaine sanglante »
Dimanche 21 mai
« Semaine sanglante »
« Les Versaillais viennent de forcer l’entrée… »
Comme une nappe de silence !
Cela a duré pour chacun le temps de faire ses adieux à la vie !
Il m’a semblé, à moi, que tout mon sang descendait vers la terre, tandis que mes yeux devenaient plus clairs et plus grands dans ma face pâlie. (L’Insurgé, chapitre 29)

Lundi 22 mai
« Semaine sanglante »
Où avais-je la tête ! Je croyais que la Ville allait sembler morte avant d’être tuée. Et voici que femmes et enfants s’en mêlent ! Un drapeau rouge tout neuf vient d’être planté par une belle fille, et fait l’effet, au-dessus de ces moellons gris, d’un coquelicot sur un vieux mur.
« Votre pavé, citoyen ! » (L’Insurgé, chapitre 30)

Lundi 22 mai
« Semaine sanglante »
Je ne vaux pas cette rouleuse de boulets et ce pousseur de canon ! Comme écharpier, je ne compte pas ! (L’Insurgé, chapitre 30)

Mardi 23 mai
« Semaine sanglante »
Oh ! la première impression a été terrible ce matin, quand, descendant vers la Croix-Rouge pour examiner où en étaient les combattants, j’ai vu des femmes fuir, emportant leurs hardes dans un mouchoir et tirant leurs mioches par la main.
« On met le feu partout ! »
Ces femmes crient ou pleurent. Il y a aussi quelques isolés qui filent en courant, et me crachent des malédictions. (L’Insurgé, chapitre 32)

Vendredi 26 mai
« Semaine sanglante »
On va en descendre une nouvelle fournée !
– Qui ?
– Cinquante-deux calotins, gendarmes ou mouchards ! »
Encore une tuerie en-dehors de la bataille !
Je les comprenais abattant l’archevêque comme on décapita le roi. L’idée le voulait, ils pensaient qu’il fallait l’exemple. Mais c’est fait ! La Bible plébéienne a son signet et ses tranches rouges, comme un missel gothique ! » (L’Insurgé, chapitre 33)
Exécution de Monseigneur Darboy à la prison de la Roquette, photomontage © Paris Musées / Musée Carnavalet gothique ! » (L’Insurgé, chapitre 33)

Samedi 27 mai
« Semaine sanglante »
Maintenant qu’il n’y a plus que ce faubourg de libre, et qu’il ne reste ni traîtres ni suspects à juger, la besogne est plus facile. Il s’agit seulement de tenir pour l’honneur, et d’aller se mettre près du drapeau, comme les officiers près du grand mât, quand le navire sombre.
M’y voici. (L’Insurgé, chapitre 34)

Dimanche 28 mai
« Semaine sanglante »
