Mort de Lazare Carnot

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Par Gilles Bertrand, Professeur émérite à l’Université de Bourgogne, Président du Conseil scientifique de l’Académie François Bourdon


Le 13 mai 1753, Lazare Nicolas Marguerite Carnot nait à Nolay, petite bourgade entre Beaune et Autun. Il est le fils de Claude Carnot, avocat et notaire, et de son épouse Marguerite Pothier. Lazare est élève du collège d’Autun puis au petit séminaire. Selon son frère ainé « il aima et cultiva dès son enfance les arts et les sciences : il eut toujours le désir de voyager pour s’instruire ». Il songe à une carrière militaire. À 16 ans Il gagne Paris et prépare le concours d’entrée à l’école royale du Génie de Mézières. En février 1771, il rejoint cette école pour deux années. Il y retrouve un jeune professeur, Gaspard Monge, originaire de Beaune, qui y développe la géométrie descriptive. Il en sort en janvier 1773 avec le grade de premier lieutenant.

Du génie militaire à l’assemblée législative (1773-1791)

Lazare Carnot sera pendant 18 ans en service dans les places fortes du Nord : Calais (1774), Cherbourg (1776), Béthune (1782), Arras (1783) où il fréquente Robespierre, Béthune (1788), Aire-sur-la Lys (1791). Capitaine à l’ancienneté en 1783, il sent bien que ses ambitions militaires sont limitées par ses origines modestes et que la noblesse, dont il n’est pas, a la meilleure part. Pendant cette période Carnot développe des travaux scientifiques et affirme ses talents. Il propose des mémoires en réponse à des concours posés par les Académies qui deviendront des ouvrages (voir la bibliographie «Lazare Carnot, œuvre savante et poétique »).

Dès juin 1788, Lazare Carnot participe au tumulte que provoque dans l’armée le plan sur la réduction des places fortes et argumente en faveur de la guerre de défense. À Aire-sur-la Lys, il organise en juin 1791 une Société des amis de la Constitution très active ce qui lui vaut d’être élu le 31 août député du Pas-de-Calais à l’assemblée législative sous Louis XVI. Le 17 mai 1791, Lazare Carnot se marie à Salperwick avec Jacqueline Sophie Dupont dont il aura deux fils survivants. Sadi naîtra en 1796 au palais du Luxembourg : polytechnicien, officier du Génie et physicien, il sera connu comme un des « pères » de la thermodynamique. Hippolyte verra le jour en 1801 à Saint Omer : homme politique, lui-même père de Sadi Carnot, président de la République en 1887.

Le révolutionnaire (1791-1797)

En 1792, député à l’Assemblée législative, il vote l’entrée en guerre de la France contre l’Autriche. Après la chute de Louis XVI, il est élu député du Pas de Calais à la Convention nationale ; il vote la proclamation de la République et est commissaire auprès des Armées. Le 17 janvier 1793, il vote pour la mort du roi sans sursis. Le Comité de salut public, sorte de gouvernement mis en place par la Convention, est créé le 6 avril 1793 : Lazare Carnot y entre le 14 Août et y devient délégué aux Armées. Après la chute de Robespierre et la fin de la Terreur, Carnot est inquiété comme tout le Comité mais la Convention thermidorienne renonce à le poursuivre, parce que, de son banc, un député s’écrie : « C’est Carnot qui a organisé la victoire » (voir l’article « D’où vient le surnom organisateur de la Victoire ? »).

Il appuie la création, le 28 septembre 1794, de l’École centrale de travaux publics transformée en septembre 1795 en École polytechnique. La conception de la nouvelle école est typique des idées de Carnot, ingénieur militaire, savant mécanicien, expert en fortifications. Le 5 mars 1795, il sort du Comité de salut public et après l’adoption de la constitution de l’an III, il est élu en septembre député dans 13 départements ; il opte pour la Sarthe pour siéger au Conseil des Anciens puis il est désigné pour être l’un des cinq membres du Directoire qui exerce le pouvoir exécutif. Les élections de mars-avril 1797 amènent une majorité royaliste dans les deux Chambres. Carnot est prêt à chercher une entente avec elle mais trois autres Directeurs s’y opposent. Le 4 Septembre 1797, avec le Coup d’État de fructidor sont éliminés les royalistes et la répression qui suit est brutale. Proscrit pour avoir favorisé l’action royaliste, Carnot doit fuir ; il rejoint Genève puis Augsbourg et plus tard Nuremberg.

Retour en grâce …puis disgrâce et exil (1800-1816)

Le coup d’Etat du 18 brumaire an VIII amène l’instauration du Consulat et l’arrivée de Napoléon Bonaparte au pouvoir.  Carnot, amnistié, est autorisé à revenir en France. D’abord nommé inspecteur en chef aux Revues le 7 février, Bonaparte le choisit comme ministre de la Guerre le 2 Avril 1800. Il démissionne le 8 octobre. Durant ces six mois, se déroulent les campagnes d’Allemagne et d’Italie avec la victoire de Marengo le 14 juin. Il siège au Tribunat de 1802 à 1807. Il vote en 1802 contre le Consulat à vie, puis seul, mais avec fracas, vote contre l’Empire en mai 1804… et se retire de la vie politique. En 1806, il achète le château de Presles près de La Ferté-Alais (Essonne), qui est toujours propriété de la famille. Voyant en 1814 le péril qui menace la France après l’échec de la campagne de Russie, il offre le 24 janvier ses services à l’Empereur, qui sans perdre une minute le nomme général de division et gouverneur de la ville d’Anvers encerclée par les coalisés. Il défend la ville d’Anvers jusqu’au 5 mai après l’abdication de l’Empereur.

Aux Cent-Jours, le 20 mars 1815, Napoléon Ier forme un gouvernement et nomme Lazare Carnot ministre de l’Intérieur, fonction qu’il occupe jusqu’à l’abdication de l’Empereur après Waterloo le 22 juin. Le 29 juin, il est élu membre de la commission provisoire de Gouvernement alors que le 8 juillet revient Louis XVIII à Paris ; le 24 juillet il est inscrit sur la liste de proscription. Lazare Carnot quitte la France le 12 octobre 1815. Maubeuge, Bruxelles, Liège, Munich, Vienne, Cracovie Varsovie sont les étapes qui le mènent à Varsovie le 16 janvier 1816, qu’il quitte en octobre 1816 pour s’établir finalement à Magdebourg avec son fils Hippolyte et leur servante Joséphine Briois. Le 2 août 1823 Lazare Carnot décède à Magdebourg. En août 1889, ses Cendres sont ramenées en France et déposées solennellement au Panthéon le 4 août à Paris. Son nom est inscrit parmi 72 savants sur la tour Eiffel.

 

À lire :

Thierry Lentz, Dictionnaire des ministres de Napoléon, Paris, Christian/JAS, 1999

Jean et Nicole Dhombres, Lazare Carnot, Paris, Fayard, 1997

Marcel Reinhard, Le Grand Carnot, Paris, Hachette Littérature, coll. “Biographie”, 1952, 2 vol.

Groupe Patrimoine écrit de Bourgogne, LAZARE CARNOT (1753-1823) Savant, républicain, bourguignon, acteur de la Révolution Française, Université pour Tous de Bourgogne Centre de Chalon, 2015 (2ème édition 2023)

 

 

Crédits photos : 

Illustration de la page d’accueil : Henri Gervex et Alfred Stevens, Le Panorama du siècle : Fête de la Fédération du 14 juillet 1790, avec les personnages importants de la Convention de 1792. peinture datée de 1889. Dans le groupe des personnages officiels, Lazare Carnot est le quatrième à partir de la gauche. © Paris Musées / Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Illustration du chapô : Médaille à l’effigie de Lazare Carnot, par Pierre-Jean David d’Angers, sculpteur, XIXe siècle © Paris Musées/Musée Carnavalet

Illustration de l’article :  Portrait posthume de Lazare Carnot, François Bouchot (1836) © Château de Versailles | WikiCommons 

Bas de page : Lazare Nicolas Marguerite, comte Carnot, général (1753-1823), peintre anonyme (vers 1815) © Château de Versailles | WikiCommons 

 

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