Naissance de Jules Rimet, promoteur du football

RETOUR AU DOSSIER

Par Paul Dietschy, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Franche-Comté, directeur du Centre Lucien Febvre, directeur de la revue Football(s). Histoire, culture, économie, société.


Si le nom de Pierre de Coubertin est associé à nombre de rues, gymnases et stades français, celui de Jules Rimet est moins utilisé. Et pourtant, le président de la Fédération internationale de football association (FIFA) de 1921 à 1954 a également joué un rôle fondamental dans le développement du sport et de sa globalisation, en défendant notamment l’universalisme français porté par le ballon rond.

Jules Rimet entre christianisme social et sport pour tous

Né à TheuleylèsLavoncourt (Haute-Saône) le 24 octobre 1873, Jules Rimet s’installe à 11 ans à Paris dans le quartier de Saint-Pierre du Gros-Caillou où ses parents se sont établis. Issu de la petite bourgeoisie, il obtient son baccalauréat avant de faire son droit. Il pratique un peu le football tout en s’intéressant au théâtre et à la littérature. C’est aussi un chrétien social, éphémère secrétaire de la rédaction de la revue Le Sillon en 1899. Deux ans plus tôt, il a créé avec son frère Modeste le Red Star Club Français, une association polysportive ouverte aux jeunes ouvriers du quartier de Grenelle. On y pratique d’abord la course à pied, ce qui permet à Rimet de devenir secrétaire de la section athlétisme de l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA).

L’unité du football français

L’essor du Red Star conduit Rimet à devenir l’un des acteurs d’un football français divisé. L’USFSA et ses dirigeants anticléricaux et la Fédération gymnastique et sportive des patronages de France (FGSPF) s’affrontent sur la question de la laïcité. En 1910, Rimet crée la Ligue de football association, un nouvel organisme membre du Comité français interfédéral qui représente le football hexagonal au sein de la FIFA. Mais la guerre éclate. Rimet, mobilisé dans la Territoriale à plus de 40 ans, accomplit une guerre courageuse passant de deuxième classe à lieutenant et obtient deux citations. Il continue à veiller aux affaires du football et réussit en avril 1919 à fonder la Fédération française de football association dont il est élu premier président.

Une paternité partagée : la Coupe du monde de football

Rimet peut se prévaloir du prestige français et occuper la présidence de la FIFA à partir de 1921, année où il est fait chevalier de la Légion d’honneur. Tout en dirigeant une société de contentieux juridique, il étend son influence au sein des milieux sportifs. Outre les deux fédérations de football, il préside le Comité national sportif (CNS) à partir de 1931, est élu à l’Académie des sports et entre dans l’actionnariat du quotidien sportif L’Auto. Au sein de la FIFA, après avoir apaisé les tensions héritées de la Grande Guerre, il soutient la création de la Coupe du monde de football. Si le format universaliste est l’œuvre du secrétaire-général de la FFFA Henri Delaunay, Rimet fait participer les Bleus à la première édition disputée en Uruguay et y représente avec talent la FIFA et la France.

Face à la politisation du sport

Dans les années 1930, le président Rimet doit compter avec la montée du fascisme. Il fait respecter la neutralité de la FIFA pendant la guerre d’Espagne quand les représentants italien et allemand défendent la fédération franquiste. En se rendant en 1939 à Buenos Aires, il parvient à éviter la sécession des fédérations sud-américaines mécontentes de l’européocentrisme de la FIFA. En avril 1942, alors que Vichy prétend nommer les dirigeants des fédérations sportives, Rimet démissionne de la présidence de la Fédération française de football. La Libération le rétablit dans ses prérogatives avant que les questions politiques ne le rattrapent à nouveau. En 1949, il soutient la politique du haut-commissaire français Grandval qui désire que les clubs sarrois de Sarrebruck et Neunkirchen soient intégrés à la FFF, ce que refusent les délégués alsaciens. Mis en minorité, il est remplacé par le journaliste Emmanuel Gambardella à la tête de la FFF.

Le football et le rapprochement des peuples

Il est plus heureux à la FIFA où il continue à faire montre de diplomatie alors que l’URSS a rejoint l’organisation. Pour célébrer son apostolat en faveur du ballon rond, il est décidé que le trophée de la Coupe du monde serait renommé Coupe Jules Rimet. Avant de quitter la FIFA, il publie l’opuscule Le football et le rapprochement des peuples (Zurich 1954), une sorte de testament politique dans lequel il loue les vertus pacificatrices du football. Il a aussi le temps de tendre le trophée qui porte son nom à Fritz Walter, capitaine de l’équipe ouest-allemande, victorieuse de la finale de la Coupe du monde 1954. Commandeur de l’ordre de la Légion d’honneur depuis novembre 1953, il s’éteint le 15 octobre 1956 à Suresnes.

À lire :

Paul Dietschy, Histoire du football, Paris, Tempus, 2014.

Renaud Leblond avec la participation d’Yves Rimet, Le Journal de Jules Rimet. Le récit rare du fondateur de la Coupe du monde, Paris, First Éditions, 2014.

Crédits Images

Illustration d’accueil : Affiche de la Coupe du Monde 1950 ©Wikimedia Commons Tous droits réservés.

Illustration du chapô : Jules Rimet, Agence Rol, 1927 © Gallica/BNF

Illustration de l’article : Jules Rimet tenant une affiche de la FIFA, vers 1954 © Sport Archive/FIFA Archives/FIFA Museum

Illustration bas de page : Réplique du trophée Jules Rimet, exposée au Musée National du Football de Preston. ©Wikimedia Commons

Print Friendly, PDF & Email
Retour en haut