Mort de Charles VI, avènement de Charles VII

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Le 21 octobre 1422, Charles VI mourait à Paris, isolé de tous. Plongé dans la guerre avec l’Angleterre depuis le milieu du XIVe siècle, le royaume de France subissait également une guerre civile qui opposait, depuis la folie du roi, les Armagnacs aux Bourguignons.

Deux couronnes pour un royaume

Le 10 septembre 1419, l’assassinat du duc de Bourgogne, Jean sans Peur, avait fait basculer le jeu politique en faveur des Anglais. Le nouveau duc, Philippe le Bon, avait crié vengeance et, en manipulant le roi, l’avait amené à déshériter son fils Charles, accusé d’avoir commandité le meurtre. Le jeune roi d’Angleterre, Henri V, désigné par le traité de Troyes de 1420 comme le successeur de Charles VI, avait épousé sa fille pour renforcer l’alliance des deux couronnes.

La mort de Charles VI intervenait dans une situation politique singulière. Henri V était mort avant son beau-père, et le Dauphin, déshérité, s’était réfugié au sud de la Loire. Pour autant, il n’avait jamais renoncé au pouvoir. Quelques jours après le décès de son père, le 30 octobre 1422 Charles se fit couronner en la cathédrale de Bourges, prenant le titre de Charles VII. Deux rois se disputaient la France, dont l’un n’était encore qu’un enfant et l’autre avait été chassé de la capitale.

Jean de Wavrin, Anciennes chroniques d’Angleterre © Gallica / BNF

Confronté à la présence anglaise et à l’hostilité du duc de Bourgogne, Charles VII continua de gouverner. Il dédoubla les institutions du royaume, à Bourges et à Poitiers, tandis que les Anglais contrôlaient le Parlement de Paris. Charles nommait ses officiers et dirigeait l’action des capitaines qui lui étaient restés fidèles, finançant ses dépenses grâce à l’appui des villes et des provinces du sud de la France.

La France en 1429 © Wikicommons

Le 27 juillet 1429, sous l’impulsion de Jeanne d’Arc, Charles VII fut sacré à Reims, mais plus de 20 années lui furent nécessaires pour reconquérir l’intégralité de son royaume.

Charles VII, vainqueur de la guerre de cent ans

Charles VII s’est révélé plus subtil que ce qu’en dit l’historiographie, qui le présente volontiers comme un souverain falot, versatile et soumis aux intrigues de sa cour. Il est vrai que la longévité exceptionnelle de son règne (plus de 38 années) lui a permis de conduire des réformes administratives et militaires de grande ampleur, qui d’une certaine façon vont annoncer la France moderne.

La Guerre de Cent Ans © Wikicommons

La reconquête de la Normandie, puis de la Guyenne, fut une œuvre de longue haleine, rendue possible grâce à l’accord trouvé avec le duc de Bourgogne le 21 septembre 1435 à Arras, mais également par la réforme de l’armée, réorganisée sous forme de compagnies d’ordonnances. Le roi a aussi favorisé le développement de l’artillerie, sous l’impulsion des frères Bureau, qui allaient donner aux Français une supériorité tactique déterminante face aux redoutables archers anglais qui avaient écrasé la chevalerie française à plusieurs reprises. Ces réformes, qui bousculaient la position de l’aristocratie et mettaient fin aux pratiques de pillage des capitaines français, souleva nombre d’oppositions que le roi dut mater.

À Castillon, le 17 juillet 1453, la victoire mit fin aux cycles des guerres franco-anglaises qui laissait un pays exsangue où les dommages de la guerre conjugués aux conséquences de la peste avait fait disparaitre une partie importante de la population.

Charles VII n’avait pas attendu le retour à la paix pour remettre le pays sur pied. La Pragmatique sanction, promulguée depuis Bourges le 7 juillet 1438, fit de lui le chef naturel de l’Église de France, détenteur d’un pouvoir de désignation des autorités ecclésiastiques et de contrôle des redevances religieuses destinées au Saint-Siège.

Le bilan de 38 ans de règne

Charles VII occupe à tort une place secondaire dans la galerie des grands rois de France. Sa personnalité déroutante a désarçonné les historiens du XIXe siècle. On lui reproche d’avoir « utilisé » Jeanne d’Arc avant de l’abandonner. Ses proches, en son temps, lui reprochait de privilégier la diplomatie aux batailles. Il est vrai que Charles VII n’appartient pas, comme une partie de ses ancêtres, à la race des chevaliers qui prennent le risque de perdre la vie dans des combats aléatoires. Les rares portraits que l’on conserve de lui confirme les descriptions des chroniqueurs : il n’avait pas un physique à manier l’épée. C’est aux résultats que nous devons juger l’homme et, sur ce point, le constat est sans appel : Charles VII, administrateur habile, a su déjouer tous les pièges, y compris ceux tissés par son propre fils, le futur Louis XI, et contribué à la prospérité du royaume. Surtout, en défendant son héritage, il a incarné, pour le peuple du royaume, l’embryon d’une nation française, qui avait découvert son identité dans son opposition à un occupant anglais, juridiquement légitime mais culturellement étranger.

À lire :

Philippe Contamine, Charles VII. Une vie, une politique, Perrin, Paris, 2017 ; rééd. Poche Tempus (2022).

Valérie Toureille, Azincourt. Histoire d’une étrange défaite, Albin Michel, Paris, 2015

Valérie Toureille, Jeanne d’Arc, Perrin, Paris, 2020.

Crédits photos : 

Illustration de la page d’accueil : Martial d’Auverge, Vigiles de Charles VII © Gallica / BNF

Illustration du chapô : Jean de Wavrin, Anciennes chroniques d’Angleterre © Gallica / BNF

Illustration de la notice générale : Charles VII (roi de France) © Wikicommons

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