Inauguration de l’Aéroport de Paris – Charles de Gaulle

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Notice rédigée par France Mémoire


Conçu par l’architecte Paul Andreu, l’aéroport Paris – Charles de Gaulle est à la fois une œuvre d’art et un bijou technologique. Associant l’esthétique à l’efficacité, sa construction, puis son inauguration, s’inscrivent dans un contexte politique de modernisation du territoire.

Roissy, troisième aéroport parisien

C’est sous l’impulsion de Charles de Gaulle puis de Georges Pompidou que commence la refonte de l’aménagement de la région parisienne. Entamé en 1966 et achevé en un délai record de huit années, la construction du troisième aéroport est concomitante des travaux du boulevard périphérique et des projets de rénovation des quartiers de La Défense et des Halles. Cette politique de modernisation s’inscrit dans un contexte marqué par une forte augmentation du trafic aérien et par l’expansion urbaine. Le domaine aéroportuaire se développe, ce que traduit une troisième génération d’aéroports qui succède aux aéroports monuments de l’entre-deux-guerres et aux aéroports vitrines des années 1960, incarnés respectivement par Le Bourget et Orly en France.

L’inauguration de Roissy a lieu le 8 mars 1974 en présence de Pierre Messmer, Premier ministre de Georges Pompidou. C’est ce dernier qui doit initialement présider la cérémonie, mais un avion s’est écrasé quelques jours plus tôt dans la forêt d’Ermenonville et l’absence du Président marque le deuil national. Malgré cette note sombre, la cérémonie d’inauguration, courte, se fait en grande pompe et réunit un millier de personnes, symbole du caractère national grandiose de cette édification. L’aérogare ouvre officiellement ses portes le 13 mars, consacrée par l’atterrissage d’un vol transatlantique en provenance de l’aéroport John Fitzgerald Kennedy de New York.

Une œuvre d’art à ciel ouvert

L’enceinte de l’aéroport est qualifiée d’étrange ou de surréaliste par les uns, de sobre et de brute par les autres. Une chose est sûre : elle ne laisse personne indifférent. C’est précisément en ce sens que l’œuvre de Paul Andreu se veut artistique autant que pratique. Pour comprendre en quoi l’esthétique et la fonctionnalité du lieu sont intrinsèquement liées, il faut remonter en 1965, lorsqu’une enquête psychosociologique est lancée par Aéroport de Paris – ancêtre du Groupe ADP – en prévision de la construction du futur aéroport. Cette étude réalisée sur les voyageurs et les exploitants d’Orly et du Bourget a pour but d’interroger les « comportements du voyageur » et leurs conséquences sur la conception des structures aéroportuaires.

Les conclusions tirées de l’étude observent une transformation du rapport de l’individu au lieu, celui-ci passant du rôle de visiteur au rôle de passager. Comme l’énonce un agent d’exploitation interviewé dans le cadre de l’enquête, « le passager n’a plus qu’un seul but, que ça aille vite ». L’heure n’est plus à la déambulation : la structure aéroportuaire ne doit plus être pensée comme un lieu de visite, où l’on s’émerveille du trafic aérien, mais comme un lieu de passage aussi pratique que possible. Paul Andreu et son équipe s’inspirent des résultats de cette étude tout au long de l’édification de la première aérogare Roissy 1, tant pour l’optimisation du lieu que pour les choix artistiques. L’accélération du transit des passagers de la voiture à l’avion et la mécanisation du transport des bagages s’accompagnent donc d’une esthétique sobre, sans faux-semblants. L’architecture est imaginée dans une optique de « dépouillement » permettant de maximiser les gains de temps et d’offrir aux passagers un bâtiment honnête et mis à nu, dénué de façade. Au-delà même de la praticité alliée à l’esthétique, Paul Andreu et son équipe s’interrogent sur le sens et l’essence même de cet aéroport. Ce sont ces considérations philosophiques qui font réellement de Roissy une œuvre d’art à ciel ouvert.

Roissy, à l’heure du transport aérien de masse

Dans les jours qui suivent l’inauguration de l’aéroport, ce dernier est unanimement salué par les journalistes, les hommes politiques de tous camps et la société civile. Même la presse internationale s’accorde pour féliciter l’avancée technologique et l’inventivité dont témoigne l’aéroport, qualifié de « Kolossal », « Gigantische » et « Monster » par les Allemands, et de   « Space age » par les Britanniques.

Conséquence de cet accueil positif et de la hausse du trafic aérien dû à sa massification, l’aérogare rencontre un succès de fréquentation fulgurant. Néanmoins, cette popularité s’avère aussi profitable que néfaste, puisqu’il en résulte une usure accélérée du bâtiment. Alors qu’il avait été conçu pour accueillir six à neuf millions de passagers par an, l’aéroport en accueille déjà treize millions dans les années 1990. En outre, la marchandisation croissante du territoire de l’aéroport et la surveillance accrue de son espace public contribuent à dégrader le bâtiment. Pour répondre à l’augmentation des flux humains et aériens, Roissy 2 qui dès 1969 s’élabore alors que Roissy 1 est encore en chantier, s’édifiera au tournant des années 1980 et ce jusqu’en 2012, date de l’achèvement du dernier satellite d’embarquement. La première aérogare a quant à elle fait l’objet de plusieurs rénovations. Avec le temps, les registres marchands de la publicité ont explosé au sein de la mégastructure aéroportuaire, mais son essence brute et son architecture hors norme continuent de fasciner les Français comme les touristes.

Source :

Paul Andreu, Nathalie Roseau, Paris CDG-1, éditions B2, collection Flashback, 2014

Un grand merci à Nathalie Roseau pour ses conseils avisés et son aimable relecture.

Crédits images :

Illustrations d’accueil :

Bannière : ADP – Roissy CDG, Photographie aérienne de Roissy 1 © ADP/Paul Andreu  – Adagp, Paris, 2024

Chapô :

Photographie : Le Terminal Roissy 1, photographie du 8 mars 1974 © Droits réservés / Groupe ADP 

Illustration de l’article :

Bannière : Cérémonie d’inauguration du 8 mars 1974 © Droits réservés / Groupe ADP 

Corps du texte :

Roissy CDG, Dessin Roissy 1 © ADP/Paul Andreu – Adagp, Paris, 2024

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