Naissance de Jeanne-Antoinette Poisson (Madame de Pompadour)

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Par Agnès Walch, Professeur des universités


Un destin surprenant attend Jeanne-Antoinette Poisson qui naît à Paris à la fin de l’année 1729, le 29 décembre. Maîtresse de Louis XV durant cinq ans, de 1745 à 1750, puis amie de cœur et ordonnatrice de la vie artistique et culturelle du royaume jusqu’à sa mort le 15 avril 1764, elle tient une place à part parmi les favorites royales. Non seulement son ascension fut vertigineuse, mais encore elle parvint à se maintenir au sommet pendant deux décennies. Poussée par un réseau d’amis de ses parents dont les frères Pâris, les fameux financiers, elle est remarquée par le roi, à vingt-trois ans, le 25 février 1745, lors du bal donné en l’honneur du mariage du Dauphin. Cet intérêt se renouvelle trois jours plus tard lors du bal donné à l’Hôtel de Ville de Paris ; il se confirme lorsqu’elle vient s’installer en septembre à Versailles, dans un petit appartement situé au-dessus de la chambre du roi, desservi par un escalier secret. Entre temps, le 24 juin, elle a été créée marquise en recevant la terre de Pompadour. La finance parisienne a réussi à placer un pion qui prend rapidement son indépendance. Jeanne-Antoinette déploie une énergie et une opiniâtreté qui tranche sur sa santé fragile : migraineuse, souffrant d’affections gynécologiques, elle parvient à rester l’amie du roi, même lorsque les sens n’ont plus de part dans leur liaison, aidée par son intelligence des situations et des caractères. Elle possède, outre des attraits physiques indéniables, une vaste culture qui fascine Louis XV. Il est vrai qu’elle « a plus lu à son âge qu’aucune vieille dame du pays où elle va régner », affirme Voltaire. Sa mère lui a donné une éducation soignée et l’a introduite dans les salons de Mme de Tencin et de Mme Geoffrin où elle a rencontré les littérateurs à la mode. L’amant de sa mère lui a fait épouser à dix-neuf ans son neveu et héritier, Charles-Guillaume Le Normant d’Etiolles, dont elle se sépare au début de sa liaison. Elle lit, se passionne pour les nouveautés scientifiques, joue sur le théâtre avec aisance. Elle ouvre pour le roi une fenêtre sur l’effervescence des idées et des modes, tout en apprenant rapidement, avec les usages de la cour, ses complications.

Une place et un statut de choix 

Dès lors, elle lutte pour conserver sa place. S’inquiétant de la versatilité d’un roi dépressif, elle pourvoie à ses plaisirs en plaçant des maîtresses inoffensives. « La vie que je mène est terrible », écrit-elle à son frère. La famille royale fait bloc contre elle qui n’est pas née dans l’aristocratie, tandis que Louis XV continue de l’arroser de ses faveurs. En mars 1752, il lui donne l’appartement, très convoité, du duc de Penthièvre, situés au rez-de-chaussée du château de Versailles, où elle reçoit tel un ministre car ses avis politiques sont écoutés.

Son influence est la plus éclatante dans les arts. Elle montre un appétit boulimique pour les résidences qu’elle reçoit en cadeau, qu’elle achète ou qu’elle loue et qu’elle occupe souvent simultanément : le château d’Etiolles en bordure de la forêt de Sénart, celui de Pompadour en Corrèze, de Menars dans le Loir-et-Cher, celui de Crécy près de Dreux, de Choisy, de Montretout et de La Celle à Saint-Cloud, de Bellevue à Meudon, de Saint-Ouen, de Champs-sur-Marne, l’hôtel des Réservoirs à Versailles, l’hôtel d’Evreux à Paris (l’Elysée) acheté en 1753 pour être près de sa fille Alexandrine dont le décès l’année suivante, à l’âge de neuf ans, la laisse inconsolable. En 1762, Louis XV entreprend de faire construire pour elle un nouveau Trianon dans le parc de Versailles (le Petit Trianon), dont elle supervise la construction mais dont elle ne verra jamais l’achèvement. Pour embellir et décorer ses nombreuses résidences, elle fait travailler des artistes dont elle assure la promotion : l’architecte Lassurance, le paysagiste Garnier d’Isle, les peintres Boucher, Quentin La Tour, Van Loo et Nattier. Elle passe commande à l’ébéniste Oeben, au sculpteur Pigalle. Férue d’arts décoratifs, elle soutient la manufacture de porcelaine de Vincennes et celle de Sèvres qui crée le « rose Pompadour », tandis que l’on prétend que la première coupe de champagne, vin dont elle raffolait, fut moulé sur son sein.

 

Bibliographie :

Lettres de Madame de Pompadour, présenté par Cécile Berly, Paris, Perrin, 2014.

Michel de Decker, La marquise des plaisirs, Paris, Pygmalion, 2007.

Evelyne Lever, Madame de Pompadour, Paris, Perrin, Tempus, 2003.

Jean Nicolle, Madame de Pompadour et son temps, Paris, éditions Albatros, 1980.

 

Crédits photos : 

Illustration de la page d’accueil : Jean-Marc Nattier, Madame de Pompadour en Diane (1746) © WikiCommons

Illustration du chapô : Assiette creuse à fond rose, Manufacture de Sèvres, atelier de production (1775) © Petit Palais

Illustration de la notice générale : Estampe d’une vue d’optique représentant le jardin et l’hôtel d’Evreux appartenant à Madame la marquise de Pompadour , vers 1750 © Musée Carnavalet

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